Qui-Je-Suis? Où-Je-Vais?

Publié le par Jaz

MiloudPoint-copie.jpgMiloud revient de son voyage au pays, transformé, une page se tourne.

 

Les questions qu'il propose pour mettre en mot la transformation qu'énonce le titre, ont surgi dans une remise en question fondamentale, au coeur de ses racines (cf. son dessin d'il y a longtemps).  

Avant son retour ici, Miloud se trouvait "là-bas", face à la terre qu'il venait d'acheter sur ses économies, pour y construire une maison, au pays de ses ancêtres. A la reprise de nos rencontres, il a raconté ce qui s'était passé (texte en bleu), une nuit d'insomnie.

  • Le jour de notre reprise, il revient avec une question sur l'origine génétique de la Dyslexie car il avait découvert que plusieurs membres de sa famille maternelle avaient eu des problèmes d'apprentissage. Un de ses oncles lui avait demandé de lui laisser le dernier texte sur le mandala qu'il avait emmené pour le lire ... et réfléchir.

Il avait apporté ce qu'il se proposait de reprendre comme travail, le livre "le passeur", le cahier rouge pour écrire avec le carnet de rééducation... Il se lance dans un récit spontané qui n'a pu être enregistré. 

 

  • Le surlendemain nous avons commencé à nous remémorrer ce qui lui avait permis d'acquérir cette nouvelle sérénité.

 

Le contexte de la seconde narration

Il arrive très en avance, en fond sonore des coptes chantent, et nous parlons culture arabo-islamique et ottomane où la musique est si différente de ce que lui, musulman, a pu connaître au Mali (du sud). Il l'identifie comme celle des Grecs (qu'on entend aux restaurants) et Turcs. Nous parlons "Egypte" pour ce que les coptes ont sauvegardé de la culture pharaonique, "Liban" et langue française, pour l'origine de la chanteuse (soeur Kaïrouz).

 

Il se lance dans l'entraineur cérébral, l'épreuve dite de construction puis les mots coupés (il se dit les mots mais le h de ryt-hme le fait bugguer par exemple) comme à la séance précédant son départ (en lien ci-dessus) et nous en arrivons à la mise en mot de ce qu'il a vécu. Nous cherchons ensemble un titre à l'article que nous allons écrire ainsi ensembles, je propose une re-naissance mais cela ne lui convient pas et après quelques évocations dialoguées il va passer à  son récit.


 

Nous sommes ainsi amenés à reparler de sa culture d'origine, du fait qu'il y a trouvé sa place sans avoir à subir le poids de ce qu'on attendait de lui, de la scolarité qui se fait en français pendant et/ou après l'école coranique. Peuhl d'origine, il parle le bambara également que beaucoup parlent dans sa région, rectifiant ainsi la reconstruction de l'anamnèse que j'avais difficilement reconstituée, basée sur quelques déductions car il ne pouvait parler de cette première période là-bas jusqu'alors. Il précise qu'il ne retenait rien car il se décrit maintenant comme hyperactif à l'époque.

 

 

Les "retrouvailles" avec lui-même

"J'ai ouvert aussi les yeux et sur la réalité. Non par rapport aux gens mais vis-à-vis de moi-même, ce que je vois autour de moi et ce que j'ai réalisé aussi. C'est vraiment ça... Je me demande si on va m'accepter comme j'ai envie d'être, comme je suis."

"Chacun a son point de vue mais personne ne m'en a parlé. Je sens qu'ils ont des choses à me dire. TOUT LE MONDE EST FAUX, non, PAS HONNÊTE à 100%."

"Au cours de mon voyage j'ai pris le temps de réfléchir. Au cours d'une discussion avec ma grand-mère, elle m'a donné des explications, c'est venu comme ça, sur le parcours que la famille a traversé. Je ne m'y attendais pas et j'ai trouvé des réponses aux questions que je me posais sur les difficultés d'apprentissage que j'avais rencontrées, et en même temps cela m'a donné envie de m'organiser par rapport à ma vie future.

 

En prenant congès, nous convenons de poursuivre son récit et je lui propose de faire un dessin. En effet, il pensait à une narration et bloquait, aussi lorsque  je précise, "comme la flèche",  il est enthousiasmé.

 

  • C'est effectivement ce qui s'est passé, le lendemain, avec comme contexte, en fond sonore, l'interview de "Grand corps malade" dans Thé ou café. Il me l'avait fait découvrir un jour. Il réclame des couleurs et comme je l'incite à prendre celles qui permettent de les travailler au pinceau, il demandera de l'eau.

 

Une figuration à valeur symbolique

 

Le commentaire de son dessin (placé en début d'article) est le suivant:

  "Peut-être que cela ne va pas vous parler. Je vous explique. (Il expire dans un grand souffle, sa façon d'évacuer le stress plus ou moins automatisée)

---Ben, pourquoi la mer? Ben J'ai fait la mer comme ça parce que c'est plat, j'aime bien quand la mer elle est calme, le vrai mot c'est "posée". C'est stable. Moi aussi... je le suis maintenant. Quand je pense à la mer qui est calme, ça me dit que j'ai envie d'être calme. Une phrase qui me vient en tête: "tout vient à point à qui sait attendre!" "

Il s'étonne lui-même d'en être là et j'explique -tu as intégré tout le travail autour de ton impulsivité. Rappelle-toi ce que tu m'as dis de ton hyper activité, enfant! Il poursuit:

---"Pourquoi le petit chemin? Pour moi, le chemin de la vie, petit à petit."

- Et de ce côté de ton dessin?

---"Du soleil qui brille. Quoi qu'il arrive, il va toujours briller... jusqu'à la fin du monde. C'est ce qui me donne envie de garder le courage. C'est pour ça que je l'ai fait briller au maximum."

Et le mot de la fin sur ce que signifie pour lui ce dessin:

---"C'est pas complètement clair mais je suis sur la bonne voie."

Il conclut: "un petit bout de chemin, calme, le soleil brille."

 

DISCUSSION

Ses dessins précédents ne s'appuyaient pas sur une représentation figurée de son environnement. Leur valeur symbolique relevait de l'interprétation qu'on pouvait en faire. La flèche elle-même, objet symbole, n'allait pas d'un point spécifié à un autre, c'était un objet symbole qui indiquait...

Avec ce premier paysage composé d'éléments certes juxtaposés, il leur manque une cohésion narrative en quelque sorte, Miloud pose des éléments de paysage qui ont chacun une valeur symbolique au premier degré, que tout le monde peut connaitre et identifier.

--Un chemin qui remplace la flèche et part de la gauche, son passé, ses racines,

--la mer pour sa capacité à figurer des transformations d'état et l'effet d'apaisement, d'ouverture à la rêverie qu'elle peut avoir,

--et le soleil, en puissance, lieu de l'énergie positive qui donne la vie à notre monde et l'éclairant lui permet de voir... ce qu'il arrive à "voir" maintenant.

 

Ses outils d'expression évoluent sur un plan symbolique, il a les mots pour confirmer cette valeur et dire ce qu'il ressent. Il a bel et bien tourné une page.

 

 

 

 

 

Publié dans Dyslexie

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Z
NDLR J'ai complètement oublié de préciser en rapportant ses propos qu'il a précisé en parlant son choix de dessiner la mer, "l'horizon", d'où la forme qu'il lui a donnée...<br /> En outre, je ne pouvais manquer de me rappeler le dessin d'Alicia, qui redécouvrant le monde sonore avait eu besoin de dessiner également la mer.<br /> Tous deux ont réalisé la mer en traçant des traits ondulés parallèles exprimant ainsi cette paix intérieure à laquelle ils aspirent.
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