Imaginaire et "collages"(suite)

Publié le par Jaz

2012 01 09CeltesB3 copie   Du travail de l'inconscient à l'ici et maintenant

            Le collage des Celtes, posé à l'envers comme ci-contre, inaugure, comme il a été analysé dans l'article précédent, un autre travail. 

Ce qui est hypothèse au départ, va se vérifier par les collages qui suivront et le fait qu'ils ne deviendront plus nécessaires...

Une hypothèse

Sans lui en parler au moment où je l'ai présenté ainsi, j'ai tout de suite associé à cette présentation le dessin si parlant de mon point de vue de Amin (9 ans), le gouffre, grotte ou caverne, qui figure dans mon interprétation, une représentation de l'inconscient, avec ses modalités de fonctionnement: inversion, projection, mise en place de défenses pour accéder au "réel"... Miloud me l'a fait évoquer également. Ils sont tous deux en outre, Amin comme Miloud,  dans une problématique interculturelle.

Pour Alicia, qui n'est plus une enfant, le travail se fait différemment, mais ce collage exprime bien le clivage sous-jacent de ces deux parts d'elle-même, une ici mais une là-bas, en quête de son origine culturelle au-dela de sa relation à son enfance là-bas, lorsque l'espace et le temps se rejoignent dans une autre dimension. L'espace défini par les deux parties du masque "Celte",  contient d'autres masques, figures parentales peut-être, on peut presque sentir la poussée vers l'espace extérieur laissé libre... Chacun étant libre d'y ressentir et d'interpréter ce qu'il y voit selon ses propres associations.

Quelles ont été les siennes? Lorsque nous avons parlé de son élaboration, nous nous sommes centrées sur ce besoin de couper ce masque, et dans sa position d'origine, sur l'identification des textures qu'il évoque, introduisant un autre sens que la vue jusque-là sollicitée par ses autres créations. J'ai évoqué dans l'article précédent l'ouverture à...

le "Travail" de l'inconscient ?

 11-01-2012-Efts-4-copie.jpg  Le dessin suivant que je ne pensais pas présenter à l'époque où il a été réalisé, marque la plaque tournante, celle où Alicia va remettre d'elle-même en cause sa relation à...

Une base pulsionnelle?

Le titre était là, présent au moment où elle a eu besoin, toutes affaires cessantes, de composer: "Les enfants perdus de la mer".

Un conflit?

Elle m'a donné ce titre, sans pouvoir l'expliquer mais avec un commentaire évocateur de cet espèce de déracinement qu'elle a vécu à l'occasion de son arrivée en France à 10 ans, la replongeant dans son enfance : "des enfants qui n'ont pas de chez eux... J'ai pensé à moi, à la coupure de quitter mon pays. Des enfants qui sont perdus, qui voguent sur la mer".

La projection

Où Alicia se situe-t-elle dans le collage? Celle qui plane, en quelque sorte, sur ce désordre, rappelant le chaos initial, mais en noir et blanc, flottant sur la mer... s'en protégeant métaphoriquement par son propre corps présent. Je pense à la protection qu'Amin avait jugé bon de placer à l'ouverture de ce que j'avais alors appelé gouffre, comme pour éviter, selon son dire, que le bonhomme projeté à l'extérieur n'y retombe.

Il y a bien comme une ouverture dans les déchirures qu'elle avait besoin de conserver...

Une issue?

Un paysage réinvesti, sans nom, ni titre, peuplé de symboles.

      25-01-2012-5-13-24-39-copie.jpg  Le collage suivant réactualise le jeu des couleurs, l'organisation des éléments déchirés apparaît, avec un thème central, un symbole fort pour elle, "la statue  représente l'Espagne, le reste les Asturies. Mon pays de naissance et d'enfance... Mon pays c'est la France. Ce retour (elle reprend à son compte certaines de nos discussions) pour me sentir mieux ici."

 

Réinvestissement de sa demande: s'entendre, de vive voix    

Ce travail de distanciation qu'elle a ainsi réalisé après son plongeon au fond d'elle-même, qui n'était plus celui du puits, du texte déjà proposé à Miloud dans une lointaine séance, ni la rencontre chaotique de morceaux d'images d'enfants sous la mer, où elle surnageait dans sa composition précédente, cette évolution m'a incitée à lui proposer de reprendre le travail sur les sons, non avec la lecture de notes mais avec le travail sur "entendre" sa voix.

Réinvestissement de ses relations affectives 

Alicia éclaire le lien avec sa petite fille dans sa relation de grand-mère dans une sorte d'inventaire de l'univers d'une enfant comme elle a pu être, il y a longtemps.2012 01 31 Tifanny6 copie                         

 

Du lien affectif au lien social    

IMG_7619Sent7-copie-copie-1.jpg   Et le dernier, car elle n'éprouve plus le besoin d'en faire d'autres, a été réalisé à l'intérieur d'une boite à chaussure, sans avoir coupé les côtés, grossièrement arrachés pour l'apporter le jour même.

Ce n'est plus l'univers de sa petite fille qui est convoqué, mais la richesse du monde, des points de vue qu'on peut en avoir. Il foisonne  d'objets,

ceux qu'elle a repérés pour les avoir choisis:

- de la mongolfière qui s'envole (s'échapper par le rêve?),

- un coureur en bleu (fuite en avant?)

- aux immeubles d'un habitat urbain (une intégration d'adulte),

- en passant par la nature et une sorte d'éventail (ses références culturelles)

et ce que son mari a vu comme un couteau (qu'elle a eu du mal à voir).

On peut y voir se dessiner comme un "U", illuminé et réuni par le "TOUS" central autour duquel elle a organisé le reste (qui a été choisi d'emblée, tout comme le ballon).

Reste dans la partie droite, qui s'est faite sans choix délibéré

- ce qui m'a sauté aux yeux, surtout quand elle lui a trouvé un titre "la sentinelle", c'est le personnage à contre jour sur la droite, qu'elle n'avait pas vu, même lorsque nous avons exploré ensemble ce nouveau collage. Quand on en a parlé, elle y verrait vu son père, elle l'a ressenti comme tel.  Il surveille tout, comme son père le faisait dans son enfance. Je lui fais remarquer qu'il tourne le dos et ouvre ainsi à un extérieur lumineux. Son mari, le premier à avoir repéré le couteau, s'y voit dans un rôle protecteur. Si cette partie nous a parlé, elle ne lui parle guère, à elle, est-ce utile? Un futur à découvrir dans le réel et non plus dans l'imaginaire!

Le travail lui aurait permis de faire le point et de passer à autre chose.

 

Il semblerait donc que, par ce collage, elle s'échappe par le rêve, et qu'elle s'intègre par le "tous" à un autre univers, celui d'une adulte avec quelques réminiscences du passé.

 Ce qui a été méli mélo d'objets partiels internes s'organise et s'unifie. Morcellement et clivage sont dépassés. Elle s'assume et signe l'oeuvre de son initiale avec la tilde de sa langue maternelle.

 

NDLR Le travail sur "entendre" sa voix fera l'objet d'un prochain article.

Publié dans Dessins

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